Sales convois

Ils étaient entassés tels des bêtes dans des wagons. Ils avaient froids, faims. Ils étaient sales. Sans doute avaient-ils peur se demandant où ce convoi pouvait bien les mener. Un autre camp ? Un voyage vers une libération ? Que pouvait bien-t-il se passer dans leur tête ? Les attitudes de chacun étaient différentes. Certains avaient besoin de se raccrocher au regard de l’autre, et d’autres au contraire regardaient par terre ou fermaient leur yeux. Sans doute pour ne pas voir leur inquiétude ou peur dans le reflet de l’autre. Les mères réconfortaient les enfants, les leurs et les autres. Ce n’étaient que des enfants. Elles les berçaient de mots doux et chacun éprouvait le besoin de s’y raccrocher.

Le bruit régulier de ce train n’arrivait pas à les bercer, ou si peu.

A chaque arrêt, des officiers hurlaient et de nouvelles personnes venaient s’entasser avec celles déjà présentes. On leur faisait un peu de place sans dire un mot mais les yeux parlaient.

Parfois des murmures s’élevaient dans un silence palpable d’inquiétude grandissante. Certaines personnes ne pouvaient se retenir de pleurer en silence. D’autres se muraient au contraire et leurs visages étaient complétement hermétiques.

Ils ne savaient toujours pas où ils allaient, ni quelle direction ils avaient prise et quand l’envie d’uriner se faisait ressentir, rien ne changeait et le train  continuait de rouler sur les rails menant vers l’horreur se foutant des vessies qui étaient prêtes à exploser et qui à un moment devaient se lâcher là au milieu de tous. L’odeur emplissait le wagon et personne ne disait rien car cela arriverait à chacun à un moment ou un autre alors.

Sans savoir pourquoi, de la même manière que certains rejoignaient le convoi, d’autres le quittaient. Les mères étaient alors séparées de leurs enfants, les époux de leurs conjointes. Les soldats n’en avaient que faire. Alors des cris des pleurs résonnaient dans le wagon avant de s’éteindre peu à peu, laissant les cœurs et les âmes brisées pour toujours.

Et puis, à un moment, les heures, les jours ayant passé tous descendaient de ce train, sans force. Pourtant ils leur faillaient encore marcher, faire un dernier effort, avant de se prendre un coup dans le dos voire une balle… et tout ça pour finir dans une grande pièce où la mort les attendait, les prendrait

Toutes ces personnes avaient fait un long voyage au bord des convois de la mort et malheureusement étaient arrivées à leur destination.

 

Isabelle Vouriot - © texte protégé

27 décembre 2014

 

 

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